



Macron et les hollandais : les coulisses d’une histoire d’amour contrariée dont la fin reste à écrire
C'est un peu comme si les enfants de César, emboîtant le pas à Cléopâtre, s'appétaient à couronner Brutus. Une drôle de scène, shakespearienne à souhait. Un scénario incroyable, que certains socialistes imaginent pourtant devenir réalité. Acte Un : Emmanuel Macron se porte candidat contre François Hollande. Acte deux, Manuel Valls pousse ce dernier à abdiquer. « Aujourd’hui, Hollande doit choisir entre celui qui l'a trahi et celui qui l'a poussé dehors », résume un proche du Président qui ne porte pas l'ancien Premier ministre dans son cœur. D’où l'acte trois, improbable mais pourtant dans quelques têtes de fidèles du locataire de l’Élysée : « si Manuel est mal élu ou par très peu de votants, les hollandais fuiront chez Macron », explique un ancien membre du gouvernement qui ajoute : « et nous serons un certain nombre à demander à Manuel de se désister afin que la gauche ait une chance d'être au second tour. Ça ne sera pas la première fois que le PS soutiendra un candidat qui n'est pas membre du parti. Les sondages de début février seront déterminants». Celui qui parle ainsi n'est pas exactement un ami du candidat à la primaire du PS. Mais chez d'autres hollandais, moins anti Valls, la même petite musique flotte sur les lèvres : « si Valls est porté par deux millions d'électeurs, Emmanuel devra s'effacer, mais si Manuel ne réussit pas à créer un sursaut, c'est lui qui devra en tirer les conclusions. Au final, il faudra qu’il n'en reste qu'un ». Seuls les fervents opposants à Emmanuel Macron, comme Michel Sapin, jurent sans ciller : « un soutien du PS à Emmanuel ? Jamais, vous m’entendez : ja-mais ! ». La messe semble dite pour certains.
Et comme souvent, c'est Ségolène Royal qui joue les émissaires et les têtes de cordée en encourageant son entourage à vanter les mérites de l'ancien ministre de l’Économie. L'un de ses proches expliquait, en novembre dernier, « je vois comme un hommage à Ségolène cette volonté de faire bouger les lignes, d'être iconoclaste, de rassembler au-delà de son camps. Elle est attentive à la démarche d'Emmanuel Macron mais loyale à François Hollande ». Le Président était alors potentiellement candidat à sa propre succession. « Comme Macron, elle parle positivement de l'avenir, avec confiance. Comme lui, elle propose des solutions, une vision optimiste, elle n'agite pas les peurs », ajoute un fidèle lieutenant faisant allusion a un certain... Manuel Valls. La ministre de l’Environnement envoie des signaux. La conséquence d'une relation compliquée avec l'ancien locataire de Matignon, bien sûr, auquel elle s'est opposée dans le dossier Sivens, mais aussi celui des boues rouges ou encore de Notre Dame des Landes. Mais il semble difficile d'imaginer que ce signal soit émis contre l'avis du Président de la République. Entre elle et lui, il n'y a plus de guerre depuis longtemps. Ils se parlent, se conseillent et s'entraident. Rien de ce qu'elle dit ne doit gêner son ancien compagnon dont d'autres proches, dont Bernard Cazeneuve, soutiennent ouvertement Emmanuel Macron.
François Hollande, et derrière lui les socialistes, gardent donc deux fers au feu, se disant que face à François Fillon, toujours fidèle à une ligne très radicale, tous les espoirs sont permis si la gauche réussit à s'unir au premier tour de la présidentielle. Reste quelques détails à régler afin que cette subtile stratégie fonctionne : convaincre Manuel Valls de se désister pour céder la place à son pire ennemi et surtout, expliquer aux électeurs de gauche, qui se seront déplacés pour voter à la primaire, que l'on fait fi de leur vote. Bref, l'union n’est pas encore pour demain.