THEME
A partir de la dernière lettre que Céline adresse à son éditeur, Gaston Gallimard, qui n’a jamais été envoyée car écrite le jour de sa mort, on assiste à un passionnant flash back sur sa vie. Une peinture réaliste, sans concession, inspirée d’extraits de l’énorme et passionnante correspondance de l’écrivain, adaptés par Emile Brami comme une pièce de théâtre dramatique. Denis Lavant incarne sans détour Céline, avec toutes ses contradictions, ses prises de position, ses choix, mais surtout sa fascination pour l’écriture, le rythme de sa prose.
POINTS FORTS
. Une scénographie parfaite, volontairement sommaire et parfaitement juste: un lit, un piano, une table, un broc, des feuillets suspendus à un fil comme en attente, Le décor aux teintes douces, dans les beiges, est planté dans sa sobriété pour laisser l’homme faire éclater ses pensées tumultueuses, telle une déferlante; le phrasé inouï d’un témoin, libre penseur, de son époque .
. Denis Lavant, prodigieux interprète, est à 200% Céline, avec sa verve gueularde, sa sensibilité à fleur de peau, son côté excessif, odieux, sa haine, ses gesticulations.
. Un jeu de scène habité que l’on reçoit en pleine gueule. Tel un pantin désarticulé vociférant et criant ses quatre vérités à la face du monde, un incroyable cabotin. Tout cela campe l’homme : une prodigieuse partition.
. On est pris, on l'écoute, comme si il nous parlait; il bouscule, tempête, entraîne. Le public est pris de court, sidéré par la modernité des textes. On passe de la construction de la prose « qui nous parle à l’oreille » à des prises de positons politiques ou des critiques au lance flamme sur les romanciers.
.Mais l’alchimie de ces textes, dont le phrasé opère à merveille, fait que l’ on entend vraiment sa fameuse « petite musique ». C’est une symphonie émotive, où l’on découvre un Céline musicien, ce qui met encore plus en valeur la musicalité de sa prose et dévoile une sensibilité peut être volontairement cachée.
POINTS FAIBLES
Je n'en vois pas.
EN DEUX MOTS ...
Il fallait oser cet énorme morceau de bravoure, mené tambour battant par Denis Lavant, Céline plus vrai que nature: une voix en colère qui sait se faire entendre et ne laisse personne indifférent.
UNE PHRASE
"La vérité ne me suffit plus. Il me faut une transposition de tout. Ce qui ne chante pas n’existe pas pour l’âme. Merde pour la réalité. Je veux mourir en musique, pas en prose."
Et, encore, cette autre: "Pas une syllabe au hasard. Je me sers du langage parlé, je le recompose pour mon besoin, mais je le force en un rythme de chanson, je demeure endanse, je ne marche pas."
RECOMMANDATION
En priorité. Allez-y ! C'est vraiment exceptionnel !
THEATRE
"Faire danser les alligators sur la flûte de pan" : D’après la correspondance de Louis Ferdinand Celine adapté par Emile Brami
Mise en scène: Ivan Morane Avec Denis Lavant
INFORMATIONS Théâtre de l’Oeuvre 55, rue de Clichy Paris 9ème Réservation: 01 44 53 88 88 www.theatredeloeuvre.fr 21H du Mardi au Samedi; et Dimanche à 15h